Notre approche

Vu les échecs répétés des habituelles stratégies de conservation en Afrique et ailleurs dans le monde, une approche différente devrait être envisagée. Les actions de conservation n’ont malheureusement pas permis de freiner l’extinction des espèces et bien que les ONG multiplient les efforts, les espèces menacées sont toujours plus nombreuses. Les mesures à long terme visant à sensibiliser la population, développer des revenus et trouver des sources de protéines alternatives prennent souvent trop de temps pour être effective. Le risque est que les espèces actuellement menacées ai disparu avant que des solutions soient concrétisées. La grande difficulté rencontrée par les organismes de protection de la nature dans les pays en voie de développement est le manque d’application de la loi sur la faune, principalement en raison de la pauvreté et de la corruption.

En Afrique de l’Ouest, la chasse illégale est la menace la plus immédiate pour nombre d’espèce dont les grands singes, les félins, les éléphants. Bien que les dispositions des lois nationales et internationales interdisent de tuer ces animaux, la faible application de la loi n’a pas réellement modifié la donne. En conséquence, la chasse et le commerce d’espèces protégées pour leur viande, ivoire, peaux et pour les bébés capturés vivants se poursuivent en toute impunité. Répondant à la demande asiatique, des réseaux criminels nationaux et internationaux organisent le commerce des grands singes et l’abattage des éléphants ainsi que le transport de leur ivoire.

L’application effective de la loi peut réduire cette menace immédiate et renforcer la possibilité d’une survie à long terme de ces espèces. A travers un programme d’investigation, d’opérations, de suivi juridique et de médiatisation, quelques ONG et projets ont mis en place une méthodologie pratique pour développer l’application effective de la loi afin de combattre la chasse et le commerce illicite des espèces au niveau national.

Le but de ce modèle, développé par l’ONG LAGA (Last Great Ape Organisation, www.laga-enforcement.org) au Cameroun, est de mettre en place une collaboration innovante entre ONG et Gouvernement afin d’établir l’application de la loi faunique. Il cible essentiellement la poursuite des grands trafiquants, son objectif est de lutter contre l’obstacle majeur à l’application de la loi sur la faune sauvage en Afrique : la corruption. LAGA a commencé au Cameroun en 2003 avec une base de « zéro poursuite judiciaire » pour les infractions fauniques. Aujourd’hui, grâce à ses méthodes, au minimum 1 grand trafiquant d’espèces protégées est arrêté par semaine. Environ 87% des trafiquants sont derrière les barreaux dès le moment de l’arrestation sans caution accordée. Les poursuites sont satisfaisantes et ont atteint la période maximale d’emprisonnement de 3 ans.

Le modèle a été répliqué dans 9 autres pays, le Congo, le Gabon, la Guinée, le Togo, le Sénégal, le Bénin, l’Ouganda, Madagascar et la Cote d’Ivoire. Avec le lancement de son projet EAGLE Guinée en Guinée, WARA a assuré la 1ère réplication du modèle en Afrique de l’Ouest et a ensuite répliqué au Sénégal par son projet EAGLE-Sénégal.

Tous ces projets travaillent en réseau et fonctionnent selon une même approche afin de :

1. d’identifier à grande échelle tous les trafiquants de produits fauniques illicites et de produire des preuves flagrantes en cas de procès ;
2. de faciliter à l’arrestation des délinquants fauniques ;
3. de faciliter les poursuites en justice et de s’assurer de l’exécution des décisions rendues ;
4. de médiatiser résultats obtenus comme moyen d’information du grand public afin d’attirer l’attention du public sur l’application effective de la loi faunique et sur les risques encourus, de même que sur les sanctions en matière faunique ;
5. d’organiser des formations du personnel spécifique des Eaux et Forêts, des douanes, de la Justice et des forces de l’ordre sur la législation faunique et les procédures pénales.

Le résultat de ces activités sont des arrestations et des poursuites fréquentes pour des délits fauniques impliquant des espèces protégées, une capacité nationale accrue d’appliquer les lois fauniques et une information plus grande du public afin de réduire la demande des espèces protégées chassées illégalement. A cela s’ajoutent diverses activités médiatiques, de formation et une publication régulière de rapports d’activités et financiers accessibles au public.